Au lendemain d’une longue période électorale ponctuée par des moments d’incertitude et multiples chamboulements du paysage politique, le temps est venu pour (re)placer l’ouverture des données, au coeur du débat public. Étant un fondement de la démocratie participative, l’Open Data est aujourd’hui plus qu’indispensable pour connaître l’état de notre société, évaluer les politiques entreprises au fil des années et prévoir les actions adéquates pour garantir son progrès. Cartographie Citoyenne vous propose dans ce cadre une rencontre pour débattre de l’ouverture des données en Tunisie, le 1 et 2 novembre 2019 à la Cité des Sciences de Tunis.
Le mouvement pour l’Open Data défend l’ouverture des données publiques, avec l’idée que l’information est un bien commun et que les données ouvertes sont nécessaires pour renforcer la puissance d’agir collective et les droits des citoyens.
En théorie, cela se traduit par la mise à disposition de la part de l’État et des acteurs institutionnels des données publiques, dans des formats réutilisables afin de rendre principalement compte de l’état de la société et de l’action publique.
En pratique, la pertinence de l’ouverture des données d’un point de vue sociétal est tributaire d’un ensemble de choix techniques tels que la gratuité, le niveau de détail, les licences de réutilisation et tant d’autres critères. Faire ces choix, impliquerait en amont une réflexion et débat publics nous permettant de définir ensemble les bases de la démocratie désirée par la société.
En Tunisie le débat sur la transparence et l’accès à l’information s’est déclenché au lendemain de la révolution, permettant d’inscrire ce droit fondamental en plusieurs temps : d’abord un décret-loi mis en place par le gouvernement intérimaire en mai 2011, ensuite l’article 32 de la constitution de 2014. Enfin et après une longue négociation sur les garanties qu’elle doit porter, une loi organique d’accès à l’information a été adoptée en mars 2016. Elle a abouti à la création d’une instance nationale dont la mission est de garantir l’application de ce droit. Entre temps plusieurs batailles ont été menées dans ce même cadre, notamment l’initiative citoyenne OpenGovTn qui s’est mobilisée à travers la campagne #7ell à partir de 2012 pour intimer l’ordre de la publicisation des débats et délibérations qui se déroulent au sein de l’assemblée nationale constituante.
En 2014 l’e gouvernement tunisien s’est vu accepter sa demande d’adhésion au Partenariat Pour un Gouvernement Ouvert et s’est engagé depuis dans une série de plans d’actions dont l’Open Data constitue la colonne vertébrale. Ce passage de l’accès à l’information, droit global et générique, à l’ouverture des données (Open Data), réflexion exigeant beaucoup plus de technicité et rigueur, s’est fait au dépend d’un débat public raisonné, renforçant au passage la confusion entre les deux concepts. Parmi les actions entamés dans ce cadre, nous notons deux projets réglementaires :
• Le premier est un projet de loi qui concerne la réutilisation de l’information , il vient compléter le cadre juridique d’accès à l’information. Actuellement en cours d’élaboration nous disposons de très peu d’informations sur le processus et l’état d’avancement de ce projet.
• Le deuxième est un projet de décret Open Data qui vient combler dans un premier temps un flou juridique et technique, et organiser les administrations dans la pratique d’ouverture de leurs données. Entamé depuis plus d’une année, le processus d’élaboration est actuellement en suspens et risque un retour à la case départ. Ceci est dû d’abord à l’élaboration séparée des deux projets induisant un éventuel conflit juridique entre la loi et le décret et donc la révision de ce dernier. Il est aussi tributaire des échéances électorales actuelles qui mèneront à la constitution d’un nouveau gouvernement en charge de l’examen du décret, dans le probable cas où le gouvernement actuel ne s’en charge pas avant la fin de son mandat.
La discussion sur ce sujet poursuit actuellement son cours dans les couloirs des administrations et ministères. Nous souhaitons à travers cette première rencontre élargir le cadre du débat, que l’on voudrait être d’abord citoyen, incluant la démocratie et les droits économiques sociaux culturels environnementaux et politiques comme axe fondamental de notre réflexion.
Au fil de ces deux journées, nous essayerons d’ébaucher une trame de réponse à trois question :
CONNAÎTRE
Quels sont les données qui permettent la connaissance de la société de son environnement et de ses ressources ?
ÉQUIPER
Quelles sont les données qui permettent d’équiper l’action civile et les luttes ?
SUPERVISER
Quelles sont les données qui permettent de superviser l’action politique ?