Compte rendu II: Gouvernance

Contexte: Directeur Général de l’Unité d’Administration Électronique, l’Expert de la Banque Mondiale

La séance s’est ouverte par un bref rappel de la part du Directeur Général de l’Unité d’Administration Électronique du contexte de l’atelier à savoir le projet de décret open data et de ses différentes phases d’élaboration déjà réalisées : la mise en œuvre d’étude stratégique suivant la méthode ODRA, la publication de rapport, l’inventaire mené par les 11 ministères qui est toujours en progression. Aujourd’hui, on passe à la réalisation du décret qui réglemente l’open data. Cette semaine, à travers ce cycle d’ateliers, on vise à avoir une vision claire du contenu de ce décret. Ces ateliers seront répartis sur 5 jours de travail et traiteront chacun d’une thématique concernant l’open data et le contenu éventuel du décret : un atelier sur la gouvernance (Qui fait quoi ? et qui responsable de quoi ?), un atelier sur les licences, sur le portail, sur les métadonnées,sur la qualité des jeux de données, sur le plan de suivi et d’évaluation et sur l’obligation des organismes.

Le projet est supporté par la Banque Mondiale dans le cadre de la mise en œuvre du plan d’action national OGP. La mission de cette semaine consiste à appuyer la réalisation du projet de décret Open Data. C’est le 3ème engagement du plan d’action national pour le Partenariat d’un Gouvernement Ouvert qui est relatif à la création d’un cadre organisationnel et juridique de l’open data. Le processus de cet appui à l’engagement 3 a commencé en septembre 2017 avec l’évaluation Open Data Readiness Assessment qui a évalué l’écosystème open data. Et suite à cette évaluation, un plan d’action a été élaboré avec comme première recommandation la préparation d’un cadre juridique open data.

Présence : Tour de Table

Directeur Général de l’Unité d’Administration Électronique / Experts internationaux en Open Data / Experts de la Banque Mondiale / Consultant en Gouvernance auprès de la Banque Mondiale / Membre de l’Instance d’Accès à l’Information / Fonctionnaires du Ministère des Affaires Religieuses / Fonctionnaires de l’Unité d’Administration Électronique / Chargée d’accès à l’information à la Présidence du Gouvernement / responsable informatique au Ministère de l’Industrie des Mines et des Énergies Renouvelables / Directeur au Ministère du Transport / Directrice au Ministère des Finances / Membres de Cartographie Citoyenne / Directeur Général de FSVC et Manager du programme Onshor / Fonctionnaire au Centre National de Télédétection et Cartographie / Membre de l’Association Tunisienne des Contrôleurs Publics, coordinatrice du programme Onshor / Fonctionnaire à l’Institut National de Statistique / Fonctionnaire à la Direction Générale des Réformes et Prospectives Administratives / Responsable d’accès à l’information à l’Institut National de Statistique / Fonctionnaire au Ministère des affaires culturelles / Membre de l’Association Tunisienne de Gouvernance Locale / Fonctionnaire au Ministère de la Défense Nationale / Membre de l’Instance Nationale d’Accès à l’Information / Directrice de l’Unité d’Administration Électronique.

Pourquoi un décret Open data (Rappel) ? Expert international en Open Data

On distingue 4 raisons majeures :

  • Premièrement, fournir un cadre juridique pour la réutilisation de l’information. C’était un élément qui existait dans les premières versions de la loi d’accès à l’information et qui a été enlevé au moment du vote au parlement. Ce qui produit un flou juridique. D’où l’objectif de combler ce vide juridique par ce décret
  • Deuxièmement, fournir un cadre juridique à l’open data qui structure les formats, la réutilisation des données, les licences, la qualité des duplications etc.
  • Troisièmement, structurer l’initiative open data c’est-à-dire mettre en place un système de gouvernance pour que le développement de l’initiative soit structuré au sein de toutes les administrations et qu’on aboutisse à un impact concret de cette initiative.
  • Quatrièmement, homogénéiser les actions et les approches de l’administration dans son ensemble.

Processus de développement d’un décret (Rappel) Expert international en Open Data

Le développement du décret a commencé avec une sensibilisation réalisée au mois d’avril. Maintenant on est dans la phase de développement du contenu. L’idée est de rassembler les opinions et avis de chacun pour sortir la première version du décret et ensuite de faire circuler cette version pour qu’elle soit commentée. Une fois que cette phase est terminée, on aura une version qui fait consensus au sein de tous les participants à la conception. Une consultation nationale suivra pour que tout un chacun qui n’a pas été inclus à la conception puisse fournir son avis à travers des commentaires. Et au terme de cette consultation, une version finale du décret suivra le cours législatif classique.

Généralement, développer un décret nécessite tout d’abord l’identification des sections et leur contenu. Par la suite, pour chacune de ces sections un comparatif d’expériences similaires dans le monde s’opère afin d’en tirer profit. Et un consensus s’établit autour de ce qui a le plus de sens dans le contexte tunisien en termes d’options. Dernier point important, il est non seulement question de définir ce qu’on va mettre dans le décret mais aussi quel niveau de détail approprié (très prescriptif ou très général).

Gouvernance : Expert international en Open Data

La partie gouvernance est la section du décret qui explique comment l’initiative open data est dirigée. Quelles sont les différentes instances ? Quelles sont leurs missions ? Quels sont leurs membres ? Quel est leur fonctionnement interne et externe ?
Dans l’étude stratégique, on a identifié 4 éléments de la gouvernance :

  • Le comité de pilotage interne au gouvernement pour conduire l’initiative au sein des différentes agences
  • Le comité paritaire mixte : c’est le comité de pilotage avec la société civile
  • L’équipe technique d’appui pour aider surtout les agences à l’implémentation de données sous format open data
  • Le réseau des point focaux open data est un modèle assez similaire des chargés d’accès à l’information dont le rôle est à la fois de conduire l’agenda open data au sein du ministère et aussi de se lier avec les autres comités pour partager les leçons apprises, les bonnes pratiques mais aussi accéder à du support, faire remonter les problèmes etc.

Nous allons voir plus en détail le fonctionnement, les missions, le rôle des différents agents de gouvernance.
Conventionnellement, le premier rôle du comité de pilotage interne est de coordonner l’ensemble des actions au sein du gouvernement et des différentes agences. Et notamment si on établit une focale sur la mission de ce comité, la coordination doit se faire à plusieurs intersections. Il y a plusieurs éléments nécessaires au développement de l’open data : le premier c’est l’inventaire déjà entamé mais son suivi dans ce cas sera une fonction principale du comité. En deuxième lieu, la publication représente le point clé de l’open data. Par conséquent, il faut s’assurer que les agences publient dans les formats adaptés et qu’elles utilisent les mêmes référentiels pour favoriser le croisement des jeux de données. D’autre part, il ne faut pas oublier qu’à travers le développement et la coordination du plan d’action, on vise un certain impact économique et social en Tunisie. Et le comité doit veiller à ce que ces impacts apparaissent via des plans de communication, des plans de formation et des plans de suivi-évaluation.

La coordination dont se charge le comité de pilotage ne s’arrête pas au niveau gouvernemental mais doit toucher les réutilisateurs de données notamment les acteurs non-gouvernementaux. Ce comité de pilotage doit donc travailler main dans la main avec le comité paritaire surtout que ce dernier a son mot à dire sur le plan d’action. De la même façon, les équipes techniques et les réseaux de points focaux constituent des éléments inter-gouvernementaux sous la responsabilité du comité de pilotage. Le comité de pilotage a dans certains pays également un rôle juridique pour tout ce qui concerne les demandes de publication. Aujourd’hui, c’est l’instance d’accès à l’information qui gère les demandes d’accès refusées. D’autres expériences ailleurs attribuent ce rôle au comité de pilotage.
A ce stade, il y a quelques questions clé qui apparaissent en termes de mission, par exemple sur la gestion du plan d’action, est ce qu’on opte pour des plans d’action annuels ou un plan d’action global avec des rapports d’activité ? L’aspect budget diffère d’une expérience à l’autre. Si on prend par exemple la circulaire d’application de la loi d’accès à l’information qui vient d’être publiée, la seule section concernant le budget est un paragraphe qui stipule que chaque entité doit préparer le budget dédié à ses activités. C’est une option extrême qui renvoie totalement la responsabilité financière à l’institution correspondante. L’autre extrémité est ce qu’on trouve par exemple dans un pays comme le Rwanda où à l’inverse c’est devenu une tâche du comité de pilotage. Le comité de pilotage dans ce cas est en charge de sécuriser les budgets, de définir l’ensemble des activités et d’allouer des budgets à chaque entité. Chaque option a ses avantages et ses inconvénients. Un des avantages de la version centralisée c’est la possibilité d’homogénéiser les actions et d’inciter les donateurs à promouvoir l’open data en finançant des plans globaux, cohérents pour toutes les institutions. L’inconvénient c’est que ça demande beaucoup plus de travail pour le comité de pilotage. Qui dit plus de travail, dit forcément plus de contraintes pour les membres d’être plus impliqués. C’est une question importante à résoudre. D’autre part, est ce qu’on cherche à avoir un comité qui se charge uniquement de la coordination ou un comité responsable au regard des autres entités ?

Discussion

Le débat s’est focalisé en premier temps sur la gouvernance en soi. Un responsable à l’Institut National de la Statistique suggère d’alléger le rôle du comité de pilotage en le libérant des référentiels que l’équipe technique pourrait prendre en charge.

D’autre part le Directeur Général de FSVC propose de simplifier les comités en s’interrogeant sur l’intérêt d’avoir deux comités, un de pilotage et un paritaire alors qu’un seul pourrait suffire et de garder le rôle opérationnel pour l’équipe technique. La spécificité de cette approche est d’intégrer la mixité gouvernement-société civile au sein même du comité de pilotage.
Il remarque également l’absence de représentants du secteur privé à la réunion et enchaîne sa vision avec la conviction qu’il faut voir l’open data sous le prisme de la réutilisation sinon le stock de données serait inutile et qu’il faut inviter les représentants du secteur privé afin de focaliser sur les data science et l’IT. Concernant l’équipe technique, ce membre de la société civile considère qu’il ne faut pas tomber dans l’erreur de confier la mission à un organe purement administratif mais de s’appuyer sur le partenariat public privé. L’expert international en Open Data prend l’exemple d’ETALAB qui a établi une équipe technique interne au sein du gouvernement pour supporter les agences. L’autre option c’est le modèle américain avec un programme de fellowship où ils ont sélectionné des experts non-gouvernementaux qu’ils ont répartis pendant 6 mois, un an sur des agences afin de les aider à prendre les bonnes décisions et à initier le processus de publication pour que les données soient réutilisables.
Un comité mixte vs deux comités ? L’expert se réfère aux expériences de par le monde. On trouve les deux cas. Le pour d’avoir un seul comité c’est plus léger. Il y a plus de coordination et moins de risque d’avoir deux comités déconnectés. L’inconvénient qu’on observe dans certains pays c’est la relative défiance des ministères et des agences au regard des approches paritaires. Quand il y a une entité clairement identifiée au sein du ministère qui a un pouvoir conféré par le premier ministre par exemples, les gens pourront suivre et remonter les problèmes. C’est pour ça que certains pays ont séparé les deux.

Le Directeur Général de l’Unité d’Administration Électronique affirme que ce type de projet ne peut pas se passer de la société civile ni du secteur privé. D’où la nécessité selon lui de garder un seul comité de pilotage mixte et d’expérimenter les programmes de fellowship avec l’appui de la société civile surtout que cette dernière a une certaine expertise et avance dans ce domaine. Il suffit de trouver le bon cadre pour favoriser ce partenariat entre la société civile et le gouvernement. Peut être en institutionnalisant pour pérenniser la collaboration… Pour le travail purement technique, le responsable est persuadé que c’est l’affaire de l’administration.

A la question du financement centralisé ou décentralisé, le Directeur Général propose de créer un fond en vu de soutenir les ministères et agences à se doter de budget fixe. En contrepartie le Directeur de FSVC pense qu’il ne faut pas obliger les ministères à se doter de budget fixe car outre l’approche top down que ça implique, le potentiel de données ouvrables diffère d’un ministère à un autre.
Quelles institutions pour le comité ? Formaliser ou pas la représentativité ?
Une proposition d’assurer la représentativité de la société civile et de ne pas inclure l’administration dans le comité mais le secteur privé a été émise.

Dans l’absence de budget propre au fonctionnement des comités, bon nombre de participants ont convenu pour un détachement des fonctionnaires. Mais la question qui se pose à ce niveau : un détachement complet ou partiel ? Et si c’est partiel comment juger le temps nécessaire ? La directrice de l’Unité d’Administration Électronique pense qu’il est difficile de quantifier car ça dépend du volume de travail.

Suite à l’exposé effectué par la cheffe de service de l’Unité d’Administration Électronique sur l’expérience des deux comités paritaires successifs de l’OGP dont les membres de société civile ont été sélectionnés par nomination, un débat s’est ouvert sur les mécanismes et critères de sélection des agents non gouvernementaux au sein du comité de pilotage. Par élection, par nomination ou par recrutement ? A ces questionnements, le Directeur Général de l’unité propose de sélectionner des experts issus de la société civiles et pas d’entités comme c’était le cas pour l’OGP. Une opposition à cet argument stipule la nécessité d’entité comme vis-à-vis légal.

Cette discussion fera l’objet du canevas de réflexion sur lequel se basera l’Unité d’Administration Électronique et le prochain comité de pilotage dans leurs prises de décision.

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